Histoires pour enfants

Lyam et le Portail du Vent Ancien

Histoires pour enfants

Dans une montagne balayée par la foudre et les secrets, Lyam, jeune chasseur de tempêtes à l’imagination débordante mais rongé par le doute, entreprend une quête périlleuse : activer le grand portail du Vent Ancien menacé par la tyrannie du Roi. Guidé par son chien loyal et un mystérieux Nomade insaisissable, Lyam devra écouter le murmure des orages, défier ses peurs, résoudre des énigmes ancestrales, et découvrir que l’audace et la solidarité sont les clefs de tous les possibles.
Lyam et le Portail du Vent Ancien

Chapitre 2 : Le Pacte de la Foudre

Chapitre 2 : La Vallée des Menhirs Oubliés

À peine le trio avait-il quitté les dernières pentes familières que la montagne sembla changer de visage. Sous la lueur pâle de la lune, des pierres levées se dressaient en cercle au beau milieu d’une cuvette oubliée, leurs surfaces couvertes de spirales et de signes presque effacés. Lyam sentit un frisson courir sous sa cape — il y avait là une solennité, une sagesse ancienne que même les adultes du village n’osaient évoquer.

Velk gronda doucement, la truffe frémissante. Le Nomade porta deux doigts à ses lèvres pour demander silence, puis effleura l’un des menhirs du bout de son bâton. Une vibration ténue, presque musicale, s’en échappa.

— Les anciens sentiers s’entremêlent ici, expliqua-t-il à voix basse. Regarde bien, Lyam.

Sur la pierre, les gravures s’animèrent sous la lumière du bâton : des ventres de nuages sculptés, des éclairs croisés et, tout autour, une spirale profonde — comme celle qu’on dessine lorsqu’on ne sait pas où mène le chemin.

Lyam approcha, fasciné. Il osa passer ses doigts sur la roche tiède, et vit dans son esprit des images : des chasseurs dansant sous la pluie, des silhouettes ailées traversant le ciel fendu de lumière.

— Ce sont les cartes du vent, chuchota le Nomade, un demi-sourire dans la voix. Mais seuls les rêveurs peuvent les lire. Trouve le chemin de ton imagination, et la vallée te guidera.

— Facile à dire, marmonna Lyam, incertain mais piqué au vif.

Il se concentra sur la spirale, laissant défiler en lui le souvenir de la première tempête qu’il avait vue, le gouffre du tonnerre et la caresse du vent dans ses cheveux. Peu à peu, la pierre chauffa sous ses doigts, dessinant dans son esprit les étapes d’un chemin sinueux, balisé par des éclairs et des souffles tourbillonnants.

— Je… crois que je vois où aller, balbutia-t-il, l’air hébété.

— Alors mène-nous, invita le Nomade. Conduis, chasseur de tempêtes.

Ils descendirent dans la vallée, entre les menhirs-sentinelles, jusqu’à ce qu’un abîme béant leur barre la route. Entre deux versants tombait un pont suspendu, fait de lianes tressées et de planches disjointes branlantes. Sous leurs pas, le vide bruissait, habité de volutes électriques bleutées. Un grondement sourd résonnait au fond, écho des colères du ciel.

— J’espère que tu n’as pas mal au cœur, plaisanta le Nomade, évaluant la corde du bout de son bâton.

Velk recula d’un pas, queue entre les pattes. Lyam sentit lui aussi son ventre se nouer, mais il se força à analyser le pont : chaque segment émettait un faible sifflement – comme si le vent y soufflait un code secret. Il comprit alors : certaines lianes vibraient, porteuses de solidité, d’autres étaient aussi fragiles qu’un fil tissé par un rêve égaré.

Il s’imagina marcher en funambule, posant mentalement des pas là où la musique du vent sonnait juste, inventant une chorégraphie aérienne.

— Suivez-moi, dit-il, voix tremblante mais décidée. Marchez en rythme, là où le vent chante grave : c’est solide.

Il guida le Nomade et Velk sur les planches justes, écoutant le vent plutôt qu’il ne regardait. Malgré un craquement sinistre, ils traversèrent sans encombre. Le Nomade lui offrit un regard impressionné, ponctué d’un clin d’œil complice.

— Tu viens de lire la première page du livre des tempêtes, commenta-t-il calmement. Ce n’est pas donné à tout le monde.

De l’autre côté, la vallée résonnait d’une lumière trouble. De hautes arches minérales creusaient la montagne, telles des gorges aux dents aiguës.

— Voici le Croc-du-Ciel, souffla le Nomade avec solennité. Ici, aucun cri, même de peur, ne tolère d’écho. La montagne punit le moindre bruit imprudent…

À cet instant, un immense éclair zébra le ciel. Une pluie d’étincelles s’abattit, faisant vibrer la moindre pierre. Velk se ramassa sur lui-même, oreilles couchées.

Lyam sentit le danger : ici le moindre souffle pouvait déclencher une avalanche d’éclairs piégés dans la falaise. Il devait trouver un moyen de passer sans bruit, mais aussi sans retenir sa respiration. Il ferma les yeux, se laissa envahir par le souvenir d’une balade nocturne avec son père — celui-ci lui racontait alors comment certains vents dansaient sans jamais troubler la surface de l’eau.

— Imaginez que nous sommes des ombres, murmura-t-il, en retirant ses bottes pour marcher pieds nus sur la pierre froide. Un pas. Silence. Le Nomade suivit, imitant la chorégraphie improbable de Lyam, tandis que Velk se glissa souplement sur la rocaille, langue pendante.

Malgré une frayeur lorsqu’une pierre fendit l’air tout près de Velk, ils parvinrent à longer la fissure sans réveiller la colère du ciel.

Mais l’épreuve n’était pas terminée.

À peine eurent-ils traversé la faille sacrée qu’un filet gorgé de lumière leur tomba dessus. Des silhouettes cachées derrière une stèle bondirent, vêtues de capes lourdes et bardées de motifs royaux. Trois hommes saisissaient le Nomade, tandis qu’un quatrième, massif, tenta d’immobiliser Lyam.

Velk, tout crocs dehors, bondit, s’agrippant à la botte du plus grand sbire, arrachant une exclamation d’effroi. Lyam profita du chaos pour se glisser sous les jambes, mais le filet électrique picotait, paralysant tout mouvement.

— Ainsi donc, murmura le chef des sbires en hissant le Nomade, c’est toi qui cherches à réveiller ce qui doit dormir…

— Nous ne voulons que sauver la montagne ! s’emporta Lyam, même s’il sentait sa voix faiblir.

Le Nomade posa sur lui un regard encourageant. — L’imagination, Lyam, chuchota-t-il à travers le vacarme. Invente la lumière. Invente le vent.

Soudain, une idée jaillit. Dans la poche de sa cape, Lyam trouva le cristal de tempête rapporté autrefois avec son père — une minuscule gemme transparente qui, exposée à la lumière, diffusait des reflets irisés. Il la serra fort, ferma les yeux, et imagina qu’elle amplifiait la moindre clarté…

Les nuages, par miracle, s’ouvrirent juste au-dessus. Un rai de lune tomba sur la gemme, la faisant exploser en myriade de prismes colorés. L’espace d’un souffle, les rayons dansèrent sur le filet, provoquant de brusques étincelles et suffisant à déséquilibrer les gardes aveuglés.

— Velk, vas-y !

Le chien bondit et, d’un coup de croc habile, trancha le filet. Lyam tira le Nomade dans sa course, puis zigzagua entre les ruines alors que les sbires beuglaient des ordres. Ils roulèrent derrière une stèle fendue, haletants mais libres.

Le Nomade secoua la tête, bouche tordue en un sourire admiratif.

— Voilà un esprit qui ne se laisse pas enfermer !

— On l’a échappé belle, marmonna Lyam, essuyant la sueur de son front.

Ensemble, ils s’enfoncèrent plus avant dans la vallée déchirée, jusqu’à une clairière où s’élevait — majestueux et menaçant — un cercle de pierres brisées, formant une arche gravée de glyphes. Un courant d’air glacé soufflait à travers, faisant résonner les inscriptions comme mille échos de souvenirs perdus.

Le Nomade posa sa main sur l’épaule de Lyam.

— Tu dois savoir la vérité sur ce portail, confia-t-il, solennel. Il ne s’ouvre pas simplement au courage ou à la force. Il reflète celui ou celle qui ose le défier : c’est un miroir du courage. Un juge silencieux. Mais la légende dit qu’il existe trois fragments à réunir — pierre, vent et lumière — disséminés dans les recoins les plus périlleux de notre montagne.

— Et le Roi les a cachés ? demanda Lyam, dont l’appréhension grandissait.

Le Nomade acquiesça.

— Ils sont protégés par ses sortilèges, disséminés là où seul un véritable chasseur de tempêtes, guidé par la compassion et la créativité, peut les retrouver. Ce n’est qu’en les réunissant que tu pourras libérer la vallée et t’ouvrir à toi-même.

Velk, épuisé mais fier, posa la tête sur le genou de Lyam. Malgré la peur, le garçon sentit naître en lui l’étincelle d’un espoir neuf. Au-dessus de leur refuge, le vent — timide — recommença à chanter. La quête, il le savait désormais, serait bien plus périlleuse et merveilleuse qu’il ne l’avait jamais imaginé.

Et, dans la brume argentée, le portail du Vent Ancien palpita d’une lumière à peine perceptible, comme une invitation à oser rêver plus grand encore.



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